"La vie d'Adèle"
On avait beau être prévenu par la presse qui l'avait vu, par sa Palme d'or reçue "à l'unanimité" dixit Daniel Auteuil, membre du juré, créant une envie irrésistible de voir ce qui semblait être le film de l'année, pourtant...
Malgré ces avertissements, on sort du film complètement scotchés, abasourdis par trois heures (passées à la vitesse grand V) d'émotion à l'état pur.
On le sait, Kechiche a fait vivre un enfer à son équipe pour arriver à une perfection absolue. Le film est directement inspiré d'un bijou de la B.D., "Le bleu est une couleur chaude".
Inspiré pas adapté. Car si le film est assez fidèle au roman graphique durant sa première partie, il l'est nettement moins dans une seconde partie qui aboutira à une fin sans doute moins pessimiste.
On ne s'étonne pas que "le bleu est une couleur chaude" ait plu au réalisateur de "L'esquive" dont on retrouve la "patte" notamment dans les scènes de lycée où les jeunes lisent du Marivaux. L'adolescence est le créneau du cinéaste. Il se complait à filmer sa jeune héroïne, encore enfant apparente quand elle dort, et la faire grandir sous nos yeux sans que cela nous perturbe. Le passage de l'héroïne de l'adolescence tourmentée à son âge adulte se fait avec une fluidité parfaite, logique.
"La vie d'Adele" n'est pas un film sur l'homosexualité, c'est avant tout une superbe histoire d'amour entre deux jeunes filles dont on décèle la passion dès leur premier regard échangé.
Kechiche à obtenu de ses deux actrices principales qu'elles s'investissent corps et âme pour lui. Et Adèle Exarchopoulos et Lea Seydoux, puisque c'est d'elles dont il s'agit, vont absolument tout accepter du cinéaste jusque ces scènes érotiques extrêmement crues et suggestives qui vont sans doute en gêner plus d'un. On a dit de ces scènes qu'elles pouvaient paraître longues. Elles sont le reflet d'une passion dévorante qui sont fidèles au livre. De les répéter plusieurs fois dans le récit démontre que leur alchimie n'est pas le temps d'une rencontre et d'un coup de foudre passager. Cela rend encore plus éprouvant la phase d'"après", la descente aux enfers d'une jeune fille perdue face à un amour parti.
Lea Seydoux et surtout Adèle Exarchopoulos nous offrent une performance exceptionnelle, à couper le souffle bien au delà de l'intensité des scènes décrites précédemment.
Kechiche, qui aime les longues séquences, leur permet d'explorer tout l'étendu de leur jeune talent grâce à des scènes malicieuses. Qu'elles soient dans un musée d'art, chez les parents de l'une ou l'autre ou dans un parc, les deux actrices dévoilent chaque fois une phase supplementaire de leur personnalité.
Le personnage principal joué par Adèle Exarchopoulos est présent dans absolument TOUTES les scènes du film ce qui nous permet de la voir évoluer sous nos yeux avec toutes ses émotions qui progressent. Adèle Exarchopoulos est aussi brillante dans les scènes de lycée où elle transmet parfaitement les craintes et les doutes d'une jeune adolescente que lorsqu'elle est une jeune prof devant ses jeunes enfants. En quelques secondes, l'actrice peut transmettre des variantes de joie et de tristesse qui rendent son personnage vraiment touchant.
Dans le film, l'alchimie des deux actrices est telle que, finalement, dans leurs scènes communes nous ne voyons plus qu'une seule personne qu'elles représentent à elles deux.
Ce merveilleux film, ce beau roman d'amour d'une rare puissance émotionnelle est sans doute la plus belle Palme d'or que Cannes ait eu depuis longtemps. Sans doute le début d'une moisson de récompenses. Sans doute aussi, à définir, le plus beau film de cette année.
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